A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.

Galerie ABC
rue Lebeau, 53 – 1000 Bruxelles

24 novembre – 30 décembre 1992

Par Jo Dustin
Le Soir – 15 décembre 1992

Entre épure acérée et légende secrète

Avec ses « Éléments d’un regard », Anne Jones nous propose un dialogue visuel double.
Une série de sculptures se dessinent dans l’espace d’une façon acérée et fine. Une rangée de trois totems minimaux met en exergue une pierre taillée. L’arc de fer tendu dans un angle aigu maintient une sorte de caillou gravé en lévitation. Le petit autel lithique pétrifie un déséquilibre périlleux. Tout s’inscrit en tensions raffinées entre pérennité et éphémère, entre fragilité et solidité. Et nous contemplons verticalement ou horizontalement des épures d’acier qui épousent la pierre bleue martelée ou polie. Ici le vide est investi par une écriture abstraite, élégante qui conjugue contrainte et respiration libre, envol et verrouillage.
Mais les travaux plus récents de cette artiste qui apprivoise les articulations, les agencements subtils, explorent une archéologie intime, plus tangible, qui réveille en nous des souvenirs enfouis.

Anne Jones a toujours aimé mettre en scène le visible et le caché. Dans ses objets rituels où les bois trouvés, la pierre taillée, l’acier poli ou rouillé, le papier s’amalgament avec justesse, vibrent ainsi une légende secrète qui fait songer aux jouets magiques créés par quelque enfant rêveur et solitaire.

Il y a ces petites boîtes emplumées aux creux oblongs qui contiennent des messages enroulés. Sarcophages minuscules, gardiens de codex illisibles, maléfiques ou bénéfiques ? La question reste ouverte

Sur une demi-lune lourde de bois ancien, une grille accueille un couteau de pierre encordé.

Un anneau usé est percé par une tige mince. La cadence abstraite s’estompe dans ces oeuvres pour suggérer de façon furtive un ensemble de sensations : conjuration matérialisée ? offrande proposée ? énigme caressée ? Les pulsions antagonistes qui animent chaque être semblent déployer devant nous leur muséologie étrange.

Et nous devenons des chercheurs, des interprètes hésitants, taraudés par une curiosité vive.

Anne Jones nous offre donc deux versants de son travail, l’un très épuré, l’autre également dépouillé mais qui révèle davantage une quête mythique.
Et ce qui étonne dans cette exposition, c’est qu’il n’y a pas une limite stricte entre les deux expressions différentes. Non, un irrésistible glissement, un constant va-et-vient s’opèrent entre ces deux pôles. Mais Rimbaud disait : « Je est un autre ». Cette formule se concrétise avec force et délicatesse devant nos yeux.

Par Roger-Pierre Turine

Le Vif – l’Express –  24 décembre 1992

De l'infiniment petit aux stèles de granit, Anne Jones nous fait traverser le mur des conventions

A 41 ans, Anne Jones est un sculpteur qui ne cesse de repenser son travail en termes d’abstractions méditatives. Pour elle, l’expérimentation du monde naît des relations que l’on peut avoir avec la matière organique elle-même. Mais son approche des matériaux tend essentiellement à nous révéler les énormes parts de silence et, en même temps, d’attraction que sous-tendent et libèrent les compli.cités de l’être avec, d’une part, les signes élémentaires et, de l’autre, le métal, la pierre, le bois, voire le papier.
On songera inévitablement à d’autres de. ses contemporains qui , eux aussi, ont emprunté ces mêmes voies de la quête des soupçons de vie enclos dans la nature des choses.

Anne Jones s’exprime par !’infiniment petit – objets réduits faits de bois, de cordelettes, de papier tressés entre eux comme s’ils enveloppaient un secret – ou par stèles de granit, strié ou poli, élancées vers le ciel comme autant de messages à résonances sacrées. Ce faisant, elle élève le débat en nous obligeant à percer le mur de nos regards envahis de conventions.
Il y a aussi, autre préhension d’un air du temps généré par nombre d’artistes actuels, une part d’évocation primitiviste dans cette synthèse des éléments qui font référence à une vie des origines.

Et l’on peut parfois songer, devant certains des travaux d’Anne Jones, aux arcs, aux flèches, aux bouts de bois mythiques qu’utilisaient nos lointains ancêtres des forêts. La tension que véhicule toute oeuvre d’art surgit ici des accidents de parcours voulus par l’artiste, des fêlures, des brisures, des apports et des agencements élaborés par la main créatrice.
Et notre adhésion naît du jeu subtil entre verticales, courbes et horizontales.

 

Par Jean-Michel Botequin

Art et culture – décembre 1992

Anne Jones (Kapele/Bos, 1951) nous propose en deux endroits et d’un an à l’autre un bilan de ses deux dernières années de travaux, prolongation en quelques Éléments d’un regard de cette proposition perceptive qu’elle élabore depuis ses premières œuvres, cette invitation à chercher ce qui est indicible dans la sculpture en et au delà de ce que celle-ci montre, de ce qu’elle cache, laisse entrevoir, en et au delà de ce que le matériau lui-même porte avant que d’être mis en œuvre comme nature et force latentes.

Car du matériau tout procède. Sa force, sans doute, brute est constructive. Il est alors potentiel de toutes transformations, même lorsque, déjà usiné, il est destiné à certaines fins. Chargé d’un vécu et dès lors artefact -c’est une donnée nouvelle dans le travail d’Anne Jones- il reste chargé de ce même point de vue latent. Attente de
mise en forme -pas d’un assemblage-, d’une prise d’espace, de confrontation, de
mise en équilibre de la pierre polie ou gravée, taraudée, bouchardée, du métal, du bois, du filin d’acier ou aujourd’hui d’objets de rebut parfois même sortis de notre conscience collective transformés bientôt en de nouveaux objets. Naissent ainsi entre autre des totems à l’équilibre fragile, mesure de la pierre porteuse de sa propre mise en tension, des arcs de métal enchâssant la pierre, arcs bandés, tendus, matériaux érigés. Tantôt le berceau-réceptacle ou de façon plus référentielle le sarcophage, tantôt la barque, des œuvres de grande dimension, d’autres plus petites mais chargées d’une monumentalité certaine par le sens qu’elles véhiculent comme par les enjeux plastiques dont elles sont chargées.
Car si l’utilisation de matériaux anciens portent d’indubitables références, celles du temps et dès lors de tout les concepts qui lui sont corollaires, d’une certaine archéologie, l’espace investi reste le premier enjeu.
Il sera question de formes circulaires ou d’angles, de transparences ou d’opacité,
d’espace mis en tension, de la fragilité d’un équilibre et de point de gravité. Ce sont là les éléments d’un regard que l’artiste propose tant à notre expérience physique qu’à nos imaginaires voyages.